mardi 11 janvier 2011

Bonne année sylvestre !


Quand l’ONU promeut 2011 année internationale des forêts, elle touche au rapport intime que chacun d’entre nous entretient avec ce milieu naturel. Ainsi, j’aime les hêtres de la forêt d’Irati au Pays Basque photographiés par Jérôme Borda, ou plus proche de moi les paysages du Bois de Vincennes dont s’est emparé Jean-François Valantin. Mais pris entre nostalgie bucolique et émotion esthétique, mesurons-nous l’enjeu politique qu’est devenue la forêt, y compris en France ?

Le sommet de Cancun s’est achevé en décembre dernier sur un accord qui marque un progrès dans la lutte contre la déforestation mondiale. Le combat est décisif, tant pour la préservation de la biodiversité que pour la lutte contre le réchauffement climatique. On estime en effet qu’environ 13 millions d’hectares de forêt disparaissent chaque année dans le Monde, provoquant 20 à 25 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, principalement en zone tropicale. Cancun a adopté un premier cadre international pour le dispositif REDD (Reducing Emissions from Deforestation and forest Degradation) qui consiste à amener les pays concernés à protéger leurs forêts en échange de moyens conséquents. Toute référence au marché du carbone a été exclue du texte, au grand dam des lobbies capitalistes. Mais de multiples questions restent ouvertes, notamment sur la dimension sociale du combat contre la déforestation (droits et intérêts des peuples autochtones), rappelant la difficulté récurrente à mettre en œuvre des politiques de développement durable alliant protection de l’environnement et progrès social.

A son échelle, la forêt française aussi recule. En 2008, elle a diminué de 28000 hectares. Il s’agit d’un tournant historique, après une période continue d’accroissement de la surface forestière nationale depuis le milieu du XIXe siècle : de 9 à 16 millions d’hectares, soit aujourd’hui près de 30% du territoire national (4e rang européen). La forêt est principalement victime de l’artificialisation croissante des sols (extension du bâti et des infrastructures), dans une moindre mesure de la reconquête par l’agriculture de certaines surfaces boisées. Elle souffre aussi d’un désinvestissement flagrant depuis une dizaine d’années, qui ne s’explique pas seulement par la déprime due aux grandes tempêtes et aux aléas des prix du bois. L’Office National des Forêts (ONF), qui gère les forêts publiques soit 27 % de la surface forestière,  doit désormais réduire ses effectifs de 1,5% par an et se plier à l’impératif de rentabilité – « produire plus tout en préservant mieux la biodiversité » résumait le Grenelle de l’Environnement. Sur le terrain, les forestiers doivent couper plus de bois, des arbres plus jeunes, et gérer des surfaces toujours plus vastes. Le malaise des personnels est patent, qui s’est traduit par plusieurs suicides, et les syndicats redoutent à terme la privatisation de l’office… 

Pour la forêt aussi, faisons le vœu d’un service public revigoré !

Paradoxalement, ce sont les forêts des métropoles occidentales qui font aujourd’hui l’objet d’un soin maximum. Ainsi dans le 12e arrondissement de Paris, le Bois de Vincennes est une forêt urbaine hautement protégée. Sur les 995 hectares du Bois, la moitié environ est couverte par le massif forestier, le reste étant constitué de prairies arborées, de lacs et rivières, de routes et de divers équipements (INSEP, Cartoucherie, Hippodrome etc.). Non seulement le Bois est un « Espace Boisé Classé à Conserver », mais la Mairie de Paris s’est dotée en 2003 d’une Charte d’aménagement durable du Bois, signée avec les communes riveraines, visant notamment à garantir un espace naturel de qualité propice à la biodiversité. Malgré les multiples usages du Bois liés à ses équipements et à son implantation urbaine, la forêt est préservée et la Mairie travaille même à transformer d’anciennes routes en voies forestières. Parallèlement, depuis 2007, la Ville mobilise ses habitants dans le cadre de l’opération « 1 Parisien, 1 arbre » afin de soutenir financièrement des opérations de reboisement au Cameroun, à Madagascar et en Haïti.

Souhaitons qu’en  2011, les Parisiens nous accompagnent – nous leurs élus – pour développer encore la mise en valeur de notre patrimoine arboricole et forestier.